Biographe et romancière, Dominique Bona est l’auteur, entre autres, de Romain Gary (1987, Grand prix de la biographie de l’Académie française), Malika (1992, prix Interallié), Stefan Zweig, Le Manuscrit de Port-Ebène (1998, prix Renaudot), Berthe Morisot. Le secret de la femme en noir (2000, Goncourt de la biographie), Camille et Paul, et Clara Malraux. Dominique Bona a été élue à l’Académie française en 2013.
L’été 14, il n’y a plus d’hommes à Paris. Par millions, ils sont montés au front, chantant la Marseillaise, un oeillet fixé à la baïonnette. Aux derniers jours d’août, dans les maisons, dans les rues, une atmosphère nouvelle gagne. Un Paris livré aux femmes où l’on s’inquiète, on s’épaule, on s’organise. On se rapproche et on s’amuse, aussi.
Dans sa villa de la rue Cortambert, Colette, la romancière, la journaliste, la femme libre, follement éprise d’Henry de Jouvenel, a fait venir ses trois amies les plus proches. Toutes appartiennent au monde sulfureux de la littérature et du spectacle. Il y a là Marguerite Moreno, comédienne de théâtre, des cheveux noirs et lisses, le profil d’une Egyptienne. Annie de Pène, la presque sœur, “des yeux dorés comme l’aventurine”, comme elle, chroniqueuse de la vie parisienne. Et Musidora, dite « Musi », danseuse de cabaret bientôt célèbre : vêtue d’une cagoule et d’un collant noir dessiné par Paul Poiret, elle sera la star des “Vampires”, l’un des grands succès du cinéma muet.
Ensemble, sous le ciel de Paris où passent les dirigeables, elles vont lire, écrire, danser, rire, cuisiner, aimer, traverser le temps cruel de la guerre. Chacune accomplit son destin. Ces quatre amies tendres se moquent du qu’en dira-t-on : en pantalon, les cheveux courts, ou en déshabillés, elles sont libres de leurs gestes, de leurs paroles, de leurs amours.
Le canon tonne au loin ; la faim s’ajoute à la peur ; mais les mots et la douceur emportent tout. C’est une ronde, joueuse, câline, où l’on croise Liane de Pougy, Natalie Barney, des enfants lointains, mais aussi Willy l’ex-mari de Colette, Jouvenel le magnifique et son fils Bertrand. Ce que nous offre Dominique Bona, c’est une histoire de femmes passionnées, insoumises et artistes, qui court jusqu’à l’été 1954, à la mort de Colette.
Dominique Bona à son meilleur, mêlant l’histoire, les amours, l’écriture et la scène.
Un art du portrait parfaitement maîtrisé, par la biographe de Zweig, de Paul et Camille Claudel, de Clara Malraux et des soeurs Heredia. Quatre femmes habitées de secrets, quatre femmes hantées par la question de la maternité, quatre femmes féminines sans être des féministes. Quatre existences brûlées par la passion. Un livre intimiste, sensuel, brûlant qui est aussi une histoire de la liberté en temps de guerre : un “Monde d’hier”, palpitant de vie.